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Les objectifs des pactes s'articulent autour de deux axes majeurs :
La société par actions simplifiée (SAS), qui est ouverte à toute personne physique ou morale permet de prendre en compte ces objectifs et de les concrétiser par des clauses statutaires. M
Mais cette forme de société ne peut pas être adoptée si la société entend procéder à des offres au public de titres financiers ou à l'admission de ses actions aux négociations sur un marché réglementé (C. com. art. L 227-2), or, les accords entre actionnaires sont nombreux dans les sociétés qui utilisent ce type de procédés.
On trouve fréquemment dans les pactes des dispositions qui auraient pu faire l'objet de clauses statutaires (droit de préemption, interdiction temporaire de cession, rachat forcé, etc.). Le recours à une convention extrastatutaire s'explique alors par les divers avantages du pacte : limitation de l'accord à certains associés seulement, souci de discrétion, caractère complexe des obligations respectives des parties, durée limitée de la convention, sanctions particulières, etc.
Les pactes contiennent en outre souvent des clauses qui ne pourraient pas être valablement contenues dans les statuts. Tel est notamment le cas des conventions de vote, celles-ci ne pouvant être valablement prévues que pour une durée limitée, ce qui est incompatible avec l'objet des statuts qui est d'organiser le fonctionnement de la société pendant toute sa durée.
Mais si le pacte d'associés offre plus de discrétion et de souplesse que les statuts, il présente certains inconvénients. Contrairement aux statuts, le pacte ne s'applique pas aux associés qui ne l'ont pas signé, sauf ratification par eux. En effet, en application du principe de l'effet relatif des contrats (C. civ. art. 1165), les clauses du pacte ne lient que les signataires ; elles sont inopposables aux tiers et à la société, sauf si elle est signataire.
De plus, la validité des engagements statutaires est rarement contestée alors que certains participants à un pacte sont parfois tentés de remettre en cause la validité de celui-ci dans le seul but d'échapper aux engagements qu'ils ont contractés.
Clauses relatives au droit de vote
Ces clauses figurent parmi les plus courantes. Elles prévoient, par exemple, un accord unanime ou un droit de veto pour des décisions importantes (notamment les modifications statutaires) limitativement énumérées, la soumission à la loi de la majorité dégagée au sein d'un syndicat de blocage, des quorums et majorités renforcés pour l'adoption de certaines décisions du conseil d'administration et des assemblées, l'engagement d'élire un nombre déterminé d'administrateurs parmi les porteurs d'une certaine catégorie d'actions, la renonciation à l'exercice du droit de vote pendant une période donnée, la renonciation au droit de vote double, etc.
Clauses concernant les dirigeants ou certains salariés
Les pactes peuvent contenir des clauses d'intéressement des dirigeants aux résultats de l'entreprise : attribution de stock-options, de bons de souscription, de parts de créateurs d'entreprise ou d'actions gratuites.
Certains pactes organisent aussi les conséquences de la révocation du dirigeant, notamment si elle intervient avant une certaine date (obligation de rachat des actions de l'intéressé à un prix prédéterminé, versement d'une indemnité, etc.). Pour être valables, ces clauses ne doivent pas porter atteinte au principe de libre révocation des dirigeants. Ainsi appliquer à la révocation d'un administrateur une clause d'un pacte d'actionnaires qui prévoit que la nomination des personnes-clés doit être préalablement autorisée par le conseil d'administration serait contraire au principe de révocation ad nutum (Cass. com. 14 mai 2013 n° 12-15.119 (n° 482 FS-PB), Sté Leps-Straling c/ Lentoni : RJDA 8-9/13 n° 719).
Répartition des bénéfices
Il s'agit d'assurer un dividende aux minoritaires. Ce résultat est recherché par une promesse des majoritaires :
Droit de souscription
En cas d'augmentation de capital, les minoritaires se voient reconnaître un droit prioritaire de souscription jusqu'à un certain niveau, souvent pour maintenir leur participation au même seuil (« clause anti-dilution ») ou un droit préférentiel aux mêmes conditions que celles offertes à un investisseur financier (« clause pari passu »).
Stabilité des capitaux propres
Les majoritaires s'engagent, si les capitaux propres deviennent inférieurs à une fraction déterminée du capital social, à régulariser le montant de ces capitaux d'une valeur au moins égale.
La sortie d'un actionnaire est l'objet de la plus vive attention de la part des membres d'un pacte, qui règlent cette éventualité par des modalités fort diverses tendant à assurer leur contrôle sur les cessions et à permettre la rupture du pacte.
Lorsque la clause de sortie contient une promesse de rachat de droits sociaux pour un prix convenu à l'avance, la question se pose de sa validité au regard de l'interdiction des clauses léonines.
Ces clauses ont pour but de maintenir la direction de la société dans les mains de ceux qui la détiennent au moment de la conclusion du pacte. A cet effet, les pactes contiennent les différents types de clauses suivants :
Clauses de préemption
Ces clauses réservent à une catégorie d'actionnaires (ou à tous les actionnaires), la possibilité d'acheter par priorité les actions dont la cession est envisagée. Les clauses de préemption extra-statutaires (encore appelées pactes de préférence) obéissent au même régime que celles qui sont incluses dans les statuts, sauf dans certains cas.
La clause de préemption doit réserver un « juste prix » au cédant. Le plus souvent, il est stipulé que la préemption s'exercera aux mêmes prix et conditions que ceux contenus dans le pacte d'actionnaires.
Le pacte doit aussi prévoir les conséquences d’un désaccord sur le prix.
Clauses d'agrément
Les clauses d'agrément permettent d'écarter l'entrée dans la société de personnes dont la présence est, pour une raison quelconque, jugée indésirable. Elles sont fréquentes dans les sociétés de famille et celles dont le capital est réparti entre différents groupes d'actionnaires qui désirent maintenir entre eux l'équilibre existant. Plutôt que dans les pactes d'actionnaires, elles figurent souvent dans les statuts des SA puisque la loi autorise expressément à les y faire figurer et que les cessions intervenant en violation de ces clauses statutaires sont nulles (C. com. art. L 228-23).
Clauses d'inaliénabilité
Ces clauses prévoient qu'aucune cession d'actions ne peut intervenir avant l'expiration d'un certain délai. L'application des clauses d'inaliénabilité (ou d'incessibilité) nécessite que les actions revêtent la forme nominative, que l'interdiction soit limitée dans le temps et soit justifiée par un intérêt social légitime.
Outre l'intérêt juridique que présente la stabilité de l'actionnariat, une clause d'inaliénabilité temporaire peut permettre à ses signataires de bénéficier du régime fiscal d'exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit (CGI art. 787 B) et d'impôt de solidarité sur la fortune (CGI art. 885 I bis).
Clauses de limitation des participations
Selon ces clauses, pour maintenir l'équilibre entre les participations, des membres du pacte, minoritaires en principe mais parfois majoritaires, s'engagent à ne pas acquérir de nouvelles actions au-delà d'un seuil déterminé : en particulier, le ou les minoritaires s'engagent à ne pas prendre directement ou indirectement le contrôle de la société ou à ne pas dépasser le seuil au-delà duquel, dans les sociétés dont les participations sont admises aux négociations sur un marché réglementé, l'offre publique d'achat devient obligatoire.
Ces clauses permettent à chaque membre du pacte de se dégager de la société par la cession de ses actions à l'autre membre qui est tenu de les lui acheter.
Leur présence est systématique lorsque les parties au pacte sont engagées dans une coopération inter-entreprises. Chacune est ainsi assurée de pouvoir, en cas de besoin, mettre un terme à l'action commune. En pratique, il suffit bien souvent que la partie non défaillante menace d'invoquer la clause de rupture pour que l'autre accepte de régler amiablement le différent, de sorte que de nombreuses clauses de ce type ne sont jamais mises en oeuvre.
Il est recommandé de ne conclure de telles clauses qu'entre partenaires de force économique comparable afin d'éviter un chantage sur le prix.
Les parties doivent prévoir le sort du pacte en cas de survenance de certains évènements. Par exemple, le pacte sera-t-il caduque en cas de fusion ?, en cas d'admission aux négociations sur un marché réglementé ? Ou encore en cas de changement de contrôle d'un associé personne morale partie au pacte ?
Les signataires peuvent aussi prévoir la transmission des droits et obligations qui découlent du pacte aux héritiers, successeurs et ayants droit des parties. Le pacte peut également préciser qu'en cas de cession de ses droits sociaux par l'une des parties, le tiers cessionnaire devra prendre l'engagement de respecter cette convention.
Les signataires ont également intérêt à prévoir les causes de caducité du pacte et si, en cas de cession d'actions par l'une des parties, le tiers cessionnaire des actions devra prendre l'engagement de le respecter.
À l'inverse, il a été jugé que l'objet d'un pacte n'avait pas disparu du fait que la société avait été placée en redressement judiciaire puisque le pacte précisait qu'il deviendrait caduc « le jour où une décision judiciaire accepterait un plan de cession de la totalité des actifs », ce qui signifiait, a contrario, qu'il n'était pas caduc en cas de plan de continuation.
Une clause d'exclusivité d'un pacte d'actionnaires devient caduque lorsque son débiteur, révoqué et licencié de ses fonctions, est dans l'impossibilité de consacrer tous ses efforts au développement de la société comme le prévoyait la clause.
Clause pénale
La clause pénale est définie comme celle par laquelle une personne, pour s'assurer l'exécution d'une convention, s'engage à quelque chose en cas d'inexécution (C. civ. art. 1226). Elle est fréquente dans les pactes où, le plus souvent, les parties y évaluent forfaitairement la somme qui sera due à l'autre partie à titre de dommages-intérêts en cas de violation du pacte. Mais les parties peuvent aussi prévoir d'autres sanctions comme l'obligation de céder ses droits sociaux.
Clause résolutoire
La résolution est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l'une des parties n'exécute pas ses obligations mais, sauf mention exprès, cette résolution n'est pas de droit ; elle doit être demandée en justice (C. civ. 1184). Pour faciliter la mise en jeu de la résolution, les signataires d'un pacte peuvent donc prévoir que celui-ci sera résolu de plein droit en cas d'inexécution de ses obligations par l'une des parties.
La clause doit mentionner les évènements dont la survenance entraînera l'extinction du contrat ; elle peut aussi préciser que son exécution nécessitera une mise en demeure préalable mais ce n'est pas une obligation. Elle peut aussi prévoir la résolution partielle du contrat.
Par ailleurs, le juge a la faculté de neutraliser la clause lorsqu'elle est mise en jeu de mauvaise foi.
Astreinte conventionnelle
Les parties au pacte peuvent s'engager à exécuter leurs obligations sous astreinte. Par exemple, un actionnaire peut s'engager à céder une partie de ses actions à un autre à une date déterminée, sous astreinte d'une certaine somme à verser à son cocontractant pour chaque jour de retard. Les juges analysent toutefois souvent ces clauses comme des clauses pénales et diminuent le montant de l'astreinte lorsqu'elle leur paraît excessive.
Clause de sortie
Il peut être organisé un droit de retrait de la société pour la victime de la violation du pacte ou, à l'inverse, l'exclusion de l'auteur de la violation. La clause doit indiquer avec précision les causes de sortie et ses modalités, notamment quant au prix de rachat des droits sociaux de l'associé sortant. Les parties peuvent envisager le recours à une expertise dont le résultat les liera.
Sur le champ d'application d'une clause par laquelle un actionnaire salarié s'engageait à rester dans la société un certain temps et promettait de vendre ses actions à un euro en cas de rupture anticipée du contrat.
Confidentialité
Les parties peuvent déclarer que le pacte a un caractère confidentiel et s'interdire d'en divulguer le contenu, sauf accord exprès des autres signataires. Cet engagement ne peut être pris que sous réserve des prescriptions légales.
Non-concurrence ou exclusivité
Les actionnaires peuvent s'engager à ne pas s'intéresser à des activités de même nature que celles développées par la société et notamment à ne pas acquérir de participations dans des sociétés concurrentes. La clause de non-concurrence peut aussi concerner un dirigeant ou un « homme clé » qui s'engage à ne pas exercer d'activité professionnelle concurrente en cas de départ de l'entreprise.
Pour être valable, la clause ne doit pas interdire à l'intéressé l'exercice de toute activité professionnelle. La chambre commerciale qui s'est ralliée pour la première fois à la position de la chambre sociale, a considéré que pour être valable la clause d'un pacte d'actionnaires souscrit par un salarié également actionnaire de la société qui l'emploie doit comporter aussi une contrepartie financière.
Si elle ne l'avait pas fait et avait exigé seulement que la clause ne soit pas disproportionnée, les sociétés auraient évité le versement d'une contrepartie financière en faisant souscrire par leurs salariés actionnaires des engagements de non-concurrence dans un pacte d'actionnaires et non dans le contrat de travail.
Si la chambre sociale et la chambre commerciale énoncent ces conditions dans les mêmes termes, elles ne les justifient pas de la même manière : pour la première, la solution est fondée à la fois sur le principe de libre exercice d'une activité professionnelle et sur l'interdiction légale d'apporter des restrictions injustifiées ou disproportionnées au contrat de travail (C. trav. art. L 1121-1) ; en revanche, la chambre commerciale vise, outre la liberté d'exercer une activité professionnelle, l'article 1131 du Code civil qui subordonne la validité d'une obligation contractuelle à l'existence d'une cause. On pourrait déduire de ce fondement, tiré du droit commun des contrats et non du seul droit du travail, que l'exigence de contrepartie financière a vocation à s'appliquer à toute clause mise à la charge d'un associé, même non salarié de la société, voire à une clause de non-concurrence insérée dans tout contrat. Cette solution mérite d'être confirmée.
Certains dirigeants associés prennent aussi un engagement d'exclusivité par lequel ils s'obligent, pendant la durée de leur participation dans la société, à ne pas exercer d'autre activité professionnelle, même dans une entreprise non-concurrente.